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dimanche, juin 17, 2007

goodbye well made book

Un salut dans la machine à quelques admirables activistes rencontré ici ou là, dont le travail si passionné, si rigoureux, m'embarasse un peu plus chaque jour de mes siestes procrastines et m'enthousiasme surtout de ces accomplissements: heureux des rencontres, et you know who you are.

suivez la flèche

J'avais tout noté sur un petit post it, dans tous les sens, à propos des Exagggerations of Peter Prince de Steve Katz:

















par là? par ici? par là? par là? par ici?



Il y a une entrée au nord, une entrée au sud, une entrée par l'ouest, une autre par l'est. Par la première, Peter Prince est plein de compassion. Par la deuxième (ou la quatrième, les jours de pluie), il se perd dans les ruelles du Caire. Les jours plein d'espoir, quand il ne doit pas aller voter la mort dans le caban, l'entrée par la gauche fait de lui un vétérinaire. Les jours remplis de rendez-vous, il sait se matérialiser hors de la plane page en papier, par la bite, dans des toilettes sales, pour un petit fuck tendre avec Linda Lawrence, une chouette fille qu'il n'aurait jamais dû rencontrer parce qu'elle vit à l'étage au-dessus de lui, dans une dimension littéraire suffisamment éloignée pour qu'elle puisse faire son boulot de Tierbeobachtungen, l'observer sans ressentir, faire ses petits compte-rendus (elle travaille pour l'O.R.E.T.D.S.F., l'Office du roman en train de se faire), mais que ne ferait on pas pour un petit moment d'intimité entre les pages, un petit rush d'iinterdit, un petit splash sur la page n'est-ce pas?

Pour résumer, l'existence supposée de Peter Prince n'est pas vraiment un livre à choix multiple (un LCM, pour ainsi dire), elle est plutôt un récit mis à mal en permanence par le doute, par la peur existentielle de prendre le mauvais chemin et de tomber dans l'abîme, de tomber nez-à-nez avec le néant ou la médiocrité, et Peter Prince lui-même est un vrai individu, pseudo écrivain à des moments des récits, pris dans la tourmente quand son géniteur, pas très affable, un peu lâche, lui fait un sacré cadeau empoisonné en lui délivrant le secret de son existence fictive, lui met tout le bazar autoreflexif du roman dont il est le héros entre les mains avant de disparaître derrière le voile de bronze qui sépare de fait très rationnel (mais qui s'en soucie?) le héros de son écrivain. Tout l'enjeu de cette satanée histoire, c'est donc, tous boulons, toutes entrailles dehors sur la page, le grand doute qui plane, de concert, chez l'écrivain qui bafouille, qui bricole, qui manipule pour essayer de faire marcher sa machine, et chez le personnage qu'il passe son temps à démonter et à remonter, un Pierre Prince un peu générique, un peu tangible qui lutte certainement pour continuer à exister dans les méandres des événements et des stratagèmes qui l'éprouvent, l'avalent, le recrachent et le ravalent. Hoquetant de tentative en tentative, le romancier avance sans rien cacher de ses doutes, pose tout dans le manuscrit, laisse les ratés, les apartés, dit tout haut ses intentions, se ravise, se rattrape aux branches en prétendant que son histoire de tentatives littéraires est une aventure pour le lecteur, quelle blague, mon dieu ce qu'il fait est très dangereux, à chaque page, lisez comment Peter manque de crever, pendant que le lecteur est à l'abri devant la page, tout à l'aise pour rire et pleurer sans rien risquer.

Pour l'histoire, The Exagggerations of Peter Prince est ce roman un peu emblématique du modernisme pop US de la fin des 60s; il a été écrit, vu d'ici, par le trop rare Steve Katz, posterboy charmant du Fiction Collective, meilleur ami de feu Ronald Sukenick (super entretien ici pour le background, les amis), colloc à une époque de Philip Glass, aîné évident des envolées athlétiques, dégondées de fantaisie sans amonts d'un Mark Leyner ou d'un Gary Lutz, et ses expérimentations tapageuses, un peu juvéniles, ricaneuses, bien moins précises et cohérentes que celles des aînés Barth ou Coover, l'ont certainement empêché de monter au panthéon des classiques modernistes, malgré sa radicalité de fond, son assaut de brouillage tout à fait terminal sur la frontière entre la vie et la fiction (son seul équivalent est certainement le LETTERS de Barth, dont les redoutables machineries modernistes fonctionnent pourtant tout autrement) . Illustre travail de littérature interventive, le deuxième roman de Steve Katz multiplie sans vraiment jamais trop en penser les enjeux les stratagèmes pour faire grossir l'épaisseur de l'objet qu'il donnera à lire, et maltraiter son monstrueux héros transformer, et si je ne vous ferai pas l'affront de tenter de dépatouiller leur tourmente emmêlée pour les énumérer, sachez tout de même

qu'il y a des jingles

qu'il y a des placements produit hilarants

qu'il y a des tractations entre le héros et son écrivain pour savoir à quoi il devrait ressembler

qu'il y a un biopic à voix haute, en forme d'interrogatoire de police

qu'il y a de la compassion

qu'il y a portrait magnifique, vibrant, dans la tourmente littéraire d'un dialogue taré au consulat américain du Caire

qu'il y a des scènes de cul censurées de bip

qu'on y fume beaucoup de weed

qu'il y a une immense multiplicité de récits emmêlés à lire dans le parallèle de deux puis trois
puis quatre puis trois colonnes qui se reflètent puis s'annulent

qu'il y a des jeux typographiques à tomber de son tabouret, de la peinture de mots, des idioties cachées dans du bruit typographiques

que presque tout est hilarant

qu'on peut lire, dans une tempête de lettres, "I wish I was Marshall McLuhan"

qu'il y a des messages codés en javanais

qu'il y a, à un moment, une télé allumée en bruit de fond d'un dialogue lui même interrompu de pets intempestifs

qu'il y a deux personnages complètement magiques, Linda Lawrence et Philip Farrel, employés à tout faire à tout jouer de la Grande Instance Narrative, et qui existent dans les limbes informes qui séparent le réel de Peter de celui de son écrivain

que la grande protagoniste féminine des récits, qui change de nom à chaque nouveau lever de rideau, est fabuleusement compliquée

qu'il y a, comme dans tous les classiques des marges de la littérature US (la Smuggler's Bible de McElroy, par exemple), des errances dans l'ancienne Europe, des moments de farniente en Italie

qu'on y trouve un bel assaut ironique sur la littérature qui cherche, dans la bouche d'un anonyme même pas imbécile: "Vous savez, j'ai le sentiment depuis un moment que le roman est déjà une forme morte, un problème qui appartient au passé. Notre siècle, notre mentalité n'ont pas la patience pour ça, avec les films, et la télé, et les tape recorders et les transistors et tout ça. Il est presque mort. Je n'arrive pas à imaginer qu'il puisse continuer à y a voir un public pour ça pendant encore longtemps, vous ne pensez pas? C'est trop ennuyeux. J'imagine que ce n'est pas un roman conventionnel que vous êtes en train d'écrire, vous n'avez pas la tête à ça. Peut-être est-ce un de ces romans de confession? J'espère juste qu'il ne s'agit pas d'un de ces meli-melos modernes; vous savez, depuis que le roman conventionnel s'est écroulé il semble que n'importe quoi, en ce moment, n'importe quoi puisse arriver. Toutes sortes de complaisances. C'est tellement consternant. Assembler n'importe quoi, découpez à tout-va, mélangez les pages, écrivez donc sur les drogues que vous prenez. Bien sûr, je ne devrais rien dire, je ne suis pas artiste moi-même au sens strict; c'est-à-dire, je n'écris pas, je ne peints pas non plus, mais j'ai comme un sentiment, et ce n'est qu'un sentiment, juste un pressentiment jusqu'à maintenant, que quelque chose d'autre est en train d'arriver. C'est comme une vocation, mais vous devez savoir de quoi il s'agit, vous êtes un artiste. Qu'il est plus nécessaire que jamais d'ébaucher des vies tangibles en oeuvres d'art; c'est la vision que j'ai de temps en temps. Consacrer toute son énergie, toutes ses ressources, pour inventer une belle vie. Créer une vue parfaite, proportionnée, pleine d'unité. Vous ne pensez-pas?"

Et c'est une immense rature, un immense ratage, un livre très drôle qui s'époumone à se déliter, une des complaisances les plus courageuses qu'il m'ait été donné de lire. Sa conclusion mystérieuse (à vous de voir) est un vertige immense qui regarde Nabokov dans le blanc des yeux et qui tend un arc immense au-dessus de la fiction. Le roman, paru en 1968 chez Holt, Rinehart and Winston, est aujourd'hui un cauchemar à dénicher dans les arrière-boutiques poussiéreuses de Nouvelle-Angleterre ou de Californie, son auteur est parti bidouiller complètement ailleurs, complètement autre chose, mais on se murmure, quelque part dans les limbes de la fiction, toujours aussi flippée, bienheureuse que l'histoire de la littérature se soit chargée personnellement de l'éradication du cas Katz, qu'un deuxième assaut de cette arme bactériologique secrète de la mise à mort de la fiction pourrait bien lui être fatale.

mercredi, juin 13, 2007

logique du sens


c'est bien celui-là

j'ai des tonnes de choses à rassembler, à étaler, à dire, ça arrive (retours sur Peter Prince, retours sur Operation Wandering Soul, retour sur Hawkes, le premier Judee Sill, Prurient et le nouveau Dopplereffekt- si seulement je n'avais pas tous ces kicks à sculpter, tous ces kanji à recopier)

en attendant, beaucoup de littérature à trouver (dans le disque, pas dans mon compte-rendu), très rèche, très smart, shout out

évidemment des très beaux mots dans la bouche

impossible à faire sur la page, aussi.